Faire volte-face à un passé traumatique marqué par des violations des droits humains pour entrevoir l’horizon avec une vision commune, c’est la vocation des réparations mémorielles. Du ressort du Haut-Commissariat à la réconciliation et au renforcement de l’unité nationale (HCRRUN), ces réparations, font l’objet d’un atelier national d’échanges et de renforcement des capacités. La rencontre a débuté, ce mardi 12 décembre à Lomé.
Pour garantir l’efficacité des réparations mémorielles, le HCRRUN adopte une méthodologie inclusive. Pendant 3 jours, institutions de la République, ministères, société civile, experts, autorités religieuse et traditionnelle engagent des discussions approfondies sur les réparations mémorielles. 3 panels seront au cœur des échanges : la place de la mémoire dans les sociétés sortant de crises, les lois et réparations mémorielles dans le processus de justice transitionnelle, enfin, les enjeux et défis des réparations mémorielles au Togo.
Cet atelier vise donc à susciter au sein des populations et décideurs, une compréhension et vision partagées sur les réparations mémorielles. Cette démarche permet de requérir l’adhésion et l’implication de l’ensemble de la communauté nationale. La présidente du HCRRUN, Awa Nana-Daboya, a souligné l’importance de ces mesures : « Les mesures d’apaisement et de redressement d’ordre mémoriel […] illustrent clairement qu’en plus des violations sociopolitiques, économiques et culturelles, des atteintes ont été portées à la mémoire du peuple togolais, une mémoire qui mérite, par conséquent, des réparations appropriées. »
Ce volet des réparations mémorielles encore en gestation, vient compléter celui des réparations individuelles et communautaires, déjà amorcées par le HCRRUN. Pour la présidente de l’institution, le chemin parcouru est significatif, mais il reste du travail à accomplir. « Les succès engrangés […] font dire aux praticiens avisés de la justice transitionnelle que le Togo constitue, en la matière, l’un des exemples les plus aboutis. Mais le HCRRUN ne saurait se complaire des avancées obtenues », a affirmé Awa Nana Daboya.
Souvent ignorées, les violations d’ordre mémoriel restent au cœur des enjeux de la justice transitionnelle. L’atelier du HCRRUN a donc pour ambition de changer le statu quo. Dans ce sens, la Commission vérité justice et réconciliation (CVJR) a précédemment proposé dans son rapport plusieurs pistes concrètes. Il s’agit de rendre hommage à certaines personnalités ayant marqué l’histoire nationale à travers plusieurs actions, notamment l’érection des monuments.
A ce propos, la recommandation 43 de la CVJR précise que « des rues et places publiques, dans toutes les villes du pays, pourront être rebaptisées des noms de victimes, pour leur rendre hommage et rappeler à la mémoire collective que plus jamais, les actes douloureux dont elles ont été l’objet ne se reproduiront plus au Togo. », a rappelé Awa Nana Daboya.
L’atelier national marque ainsi une nouvelle étape dans la réalisation des réparations mémorielles. Au-delà des débats, il ambitionne de produire un rapport général, une Feuille de route pour concrétiser les recommandations de la CVJR. Mais selon l’institution chargée des réparations, le succès de cette initiative dépendra de l’implication de tous les Togolais.
L’engagement du Togo sur la voie de la justice transitionnelle fait suite à l’Accord politique globale (APG) de 2006. Ce processus s’est poursuivi par la création de la CVJR et du HCRRUN. Awa Nana Daboya a salué la politique de réconciliation prônée par le président, Faure Essozimna Gnassingbé. Créé en 2014, le HCRRUN a pour mission de mettre en œuvre les recommandations de la CVJR.
Pour le Garde des sceaux, ministre de la Justice et de la Législation, Mipamb Nahm-Tchougli« les choix difficiles opérés par le chef de l’Etat pour relancer le processus de réconciliation nationale durement fragilisé par plusieurs années de crises et de violences sociopolitiques ont mis en lumière ses qualités de meneur d’hommes. Grâce à ses nombreuses actions, il a su progressivement conduire le peuple togolais vers une stabilité politique et une paix durables ».
Les réparations mémorielles au Togo, « s’intègrent dans une démarche politique globale qui prend racine dans la volonté du chef de l’Etat, de poser une nouvelle pierre porteuse d’espoirs sur l’édifice de réconciliation et d’unité nationales laissé par ses prédécesseurs », a indiqué Mipamb Nahm-Tchougli.
Dans un contexte mondial où les enjeux de mémoire deviennent centraux, le Togo montre la voie en intégrant cette dimension dans son processus de réconciliation. En soignant les blessures du passé, le pays œuvre à bâtir un avenir plus juste et plus uni.